Alors que l'évolution de notre société réserve une place prépondérante à l'internet et aux technologies de la communication dans la vie quotidienne, la question de leur accessibilité reste fort peu soulevée. La notion d'accessibilité aux personnes handicapées est d'ailleurs spontanément associée, par la plupart des gens, aux bâtiments et services publics ou aux transports en commun, mais très rarement aux sites web.
Pour certaines personnes handicapées, l'informatique est un moyen de pallier à des difficultés de communication auxquelles elles peuvent être confrontées au quotidien. Par des technologies additionnelles installées sur leur ordinateur et adaptées à leur handicap, elles accèdent à toutes les fonctionnalités de l'ordinateur. L'information numérique ou digitale est par nature plus accessible que l'information imprimée ou parlée. En tant que source d'information numérique, l'internet est porteur d'un énorme potentiel en matière de communication accessible. Cependant, ce potentiel de communication accessible ne peut se dévoiler uniquement que si les sites web sont conçus en respectant les principes et standards d'accessibilité.
Le présent Moniteur est un instrument de mesure développé en 2007 par AnySurfer en collaboration avec K-point, le centre de recherches et de connaissances sur les TIC et l'inclusion de la Katholieke Hogeschool Kempen (l'Institut Supérieur Catholique Campine). Le Moniteur fournit les résultats de l'évaluation de l'accessibilité d'un certain nombre de sites web belges. Au cours de l'année scolaire 2011-2012, 738 étudiants de 12 écoles supérieures en informatique ont contrôlé quelque 380 sites Web belges.
En 2012 seuls 12,6% des sites examinés ont obtenu un score d'au moins 75%, seuil à atteindre pour être considéré comme un site web raisonnablement accessible. C'est très similaire aux résultats obtenus les années précédentes.Par ce projet, nous voulons sensibiliser les étudiants en informatique, en webdesign et multimédia à l'importance de garantir l'accessibilité de l'internet à tous et leur expliquer les principes de la conception universelle. En encourageant leur participation à la rédaction du présent Moniteur, nous espérons qu'ils contribuent, à leur tour et à leur manière, au développement de l'internet accessible. Par le biais des résultats de cette recherche, nous rendons également compte de la problématique aux responsables, aux concepteurs, designer et développeurs de sites web ainsi qu'aux décideurs et pouvoirs politiques.
Nous avons travaillé avec deux échantillons. Le premier est un échantillon général constitué de 245 sites web belges. Le second est constitué de 146 sites du gouvernement flamand.
Il y a 11 sites qui se trouvent à la fois dans l'échantillon général et dans l'échantillon du gouvernement flamand. En additionnant le nombre de sites web dans chacun des échantillons, et en soustrayant les doublons, nous arrivons à un total de 380 sites web contrôlés.
Cet échantillon contient des sites web belges. Il a pour but de nous donner une idée globale de l'accessibilité du paysage internet belge. Pour garantir une certaine continuité d'une année à l'autre, nous avons maintenu les catégories existantes. Les catégories de sites sont:
En l'absence de source officielle et fiable de statistiques de visites des sites web belges, nous avons utilisé Google pour faire notre sélection. Nous avons sélectionné l'option "Rechercher dans les sites web belges" et utilisé les noms de catégories, au besoin complétés avec les synonymes et les mots clés complémentaires, en guise de mots clés. Nous avons considéré comme base de départ les 5 résultats de recherches les plus pertinents lorsqu'un filtre manuel additionnel semblait nécessaire pour garantir la représentativité de l'échantillonnage.
L'échantillonnage comporte 245 sites. Chaque catégorie contient, si possible, aussi bien des sites francophones que néerlandophones.
A la demande du service Emancipatiezaken du Gouvernement flamand, nous avons crée une catégorie spéciale, Gouvernement flamand, contenant 146 sites web. La liste a été fournie par eux dans l'objectif d'évaluer les résultats des politiques d'accessibilité mises en place dans le passé.
Pour pouvoir obtenir des résultats pour tous les sites de nos échantillons, nous faisons appel à des étudiants en webdesign.
Dans un premier temps nous les sensibilisons à l'accessibilité lors d'une conférence intégrée à leur programme de cours. Lors de cette conférence nous leur expliquons également comment évaluer l'accessibilité d'un site web au moyen de la procédure du Quickscan.
Ensuite, chaque étudiant analyse 2 sites et encode les résultats dans une base de données. Etant donné le grand nombre d'étudiants qui participent, la grande majorité des sites sont analysés par plusieurs étudiants.
Les écoles suivantes ont participé cette année:
La procédure habituelle d'analyse, l'audit AnySurfer, est trop longue pour être utilisée dans le cadre de ce moniteur. C'est pourquoi nous avons développé une méthode d'analyse permettant d'obtenir une évaluation rapide et fiable de l'accessibilité d'un site web: le QuickScan.
Le QuickScan est une sélection de 15 critères considérés comme fondamentaux pour garantir l'accessibilité d'un site Web. Nous tenons à rappeler que le QuickScan reste un outil d'évaluation et ne remplace pas la procédure complète d'audit AnySurfer. Cette dernière reste nécessaire pour se prononcer quant à l'accessibilité complète d'un site.
En d'autres termes, le QuickScan permet de répondre à la question : "Ce site web satisfait-il aux critères minimum d'accessibilité?".
Pour obtenir une appréciation quantifiable, chacun des 15 critères est pondéré (*) de 1, de 2 ou de 3. Un site web réussit le test du QuickScan s'il obtient un score d'au moins 75%.
Dans son rapport, l'étudiant doit sélectionner une des appréciations "Ok", "Pas Ok" ou "Pas d'application" et ajouter un commentaire pour expliquer l'appréciation. Chaque site web est évalué par plusieurs étudiants.
Les étudiants contrôlent au moins 6 pages représentatives de chaque site web. Parmi la sélection, les pages suivantes sont typiquement reprises:
Les résultats sont encodés dans une base de donnée par le biais d'un formulaire en ligne. Les professeurs concernés ont accès à toutes ces données afin de pouvoir évaluer le travail de leurs étudiants.
Le calcul des résultats comporte les étapes suivantes:
De manière générale on va supposer que la majorité a raison. Quand tous les étudiants ont évalué un critère de la même manière, c'est simple:
Si tous les résultats ne concordent pas:
De cette manière on obtient pour chaque site web 15 résultats, 1 par critère.
Nous avons attribué à chaque critère un poids de 1, 2 ou 3 en fonction de son importance. Pour obtenir le score d'accessibilité d'un site nous faisons une moyenne pondérée des résultats.
Pour chaque critère nous faisons également une moyenne des résultats obtenus sur tous les sites.
30 des 245 sites contrôlés (12,55%) ont obtenu un score de 75% ou plus et peuvent donc être considérés comme accessibles selon les critères de cette étude.
Ci-dessous vous voyez les détails par tranche de 10%:
92 des 146 sites évalués (63,7%) ont obtenu un résultat supérieur à 75%.
Ci-dessous vous voyez les détails par tranche de 10%:
Le tableau ci-dessous reprend les résultats pour chaque critère, avec le score obtenu pour les sites de l'échantillon général et celui du gouvernement flamand.
* Pondération: le chiffre exprime l'importance, le poids du critère. Plus le chiffre est élevé, plus le critère est important. Ainsi, un site qui ne respecte pas le critère 2 (avec une pondération de 3) aura un score moins élevé qu'un site qui ne respecte pas le critère 15 (pondéré à 1).
Ci-dessous chaque critère est expliqué brièvement et les résultats sont repris également. Les graphiques représentent les résultats pour l'échantillon général.
Le texte placé dans la balise title d'une page, donc son titre, est le premier élément lu par les lecteurs d'écran. S'il y est défini avec pertinence, s'il est précis et unique, il constitue une information capitale pour l'utilisateur de synthèse vocale.
Le titre de la page est visible dans la barre de titre des fenêtres du navigateur et est fréquemment utilisé par les moteurs de recherche pour afficher les résultats de la requête. Ce même titre s'affichera dans la liste des favoris de tout utilisateur s'il enregistre votre site dans sa liste.
Il est préférable que le titre reprenne chaque fois le nom du site précédé par la rubrique visitée. Exemple: "Nos services - Imprimerie Dupont" ou "Contact - AnySurfer"
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
A cause de déficiences motrices ou visuelles certains internautes n'utilisent pas de souris et naviguent à travers votre site en utilisant uniquement leur clavier. De manière générale un webdesigner ne doit rien faire de spécial pour que cela soit possible. Par contre, sur certains sites web il existe des actions qu'on ne peut effectuer uniquement qu'avec la souris, comme l'utilisation d'un menu déroulant. Cela peut bloquer complètement certains visiteurs, qui n'auront accès qu'à une partie du site.
A côté des menus déroulants, on recontre également parfois des boutons qui ne sont activables qu'en cliquant dessus, ou des actions déclenchées par un double-click, pour lequel il n'existe pas d'équivalent au clavier. Heureusement il suffit en général d'une petite adaptation technique pour rendre ce type d'interface également accessible au clavier.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Lorsqu'un visiteur parcourt un site en utilisant le clavier, le focus se déplace de lien en lien sur la page. Souvent le lien ou l'élément qui a le focus est indiqué visuellement par un fin cadre en pointillés. Dans certains cas cette indication visuelle a été supprimée. Ceci n'est pas permis car il est alors impossible de s'orienter dans la page si l'on s'y déplace au moyen de la touche tab car on ne sait pas sur quel lien se trouve le focus. Dans d'autres cas le focus a été accentué et le confort de navigation est bien meilleur.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Il ne s'agit pas de différencier les liens en leur réservant des couleurs franches et contrastées, cette distinction serait inutile aux personnes atteintes d'achromatopsie ou daltoniennes. Il importe de s'assurer que les liens peuvent être identifiés dans tous les cas. Le meilleur moyen reste le soulignement (continu ou pointillé). Il n'est pas nécessaire d'assurer cette distinction pour les liens actifs ou visités.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
L'internaute déduit la destination d'un lien de son intitulé. Il est donc primordial que celui-ci soit significatif. Idéalement, il faudrait pouvoir déterminer la destination d'un lien à partir du seul intitulé, et donc éviter les intitulés du type 'cliquez ici'.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Lorsqu'il y a une animation qui dure plus de 5 secondes sur une page web, il faut toujours que le visiteur puisse interrompre et/ou arrêter l'animation. Si l'animation ne démarre pas automatiquement mais uniquement sur commande de l'utilisateur, c'est encore mieux, mais pas obligatoire. Le contenu animé peut poser problème à quelqu'un qui ne lit pas rapidement ou qui a un trouble de la concentration. Les animations peuvent aussi poser problème aux lecteurs d'écran.
Les personnes handicapées de la vue utilisent généralement des programmes informatiques additionnels pour lire le contenu de l'écran ou agrandir et modifier les modes d'affichage. Ces logiciels repèrent les images et en lisent le contenu des textes alternatifs (attribut alt dans la balise img) si l'auteur de la page les a correctement ajoutés.
Si les textes alternatifs (attribut alt) sont absents les logiciels annoncent la présence d'une image et le nom du fichier de l'image en guise de description. C'est pourquoi, TOUT élément graphique sans exception doit avoir un attribut alt placé dans sa balise.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
En 2006 YouTube a révolutionné le monde la vidéo sur internet. Sur Youtube.com tout le monde peut regarder et partager librement des vidéos. YouTube permet également aux rédacteurs web d'incorporer des vidéos simplement en les invitant à copier coller un extrait de codes source. Le résultat de cette simplification: la multiplication de contenu vidéo sur les sites internet.
Plus de 55% des sites évalués contiennent des vidéo. Si la vidéo fait partie du contenu propre du site, comme des reportages, interview ou spot-tv réalisés par le propriétaire du site alors il importe de rendre cette information accessible pour les personnes sourdes ou malentendantes, même si les vidéos sont hébergées sur YouTube ou autre.
Ce problème concerne tout particulièrement les sourds et les malentendants. Quelqu'un qui n'entend pas le son doit pouvoir lire l'information sonore. Celui ou celle qui ne voit pas doit pouvoir disposer de l'information vidéo soit sous forme audible soit sous forme textuelle. Dans le cadre de ce quickscan il est suffisant que les videos soient retranscrites, le sous-titrage n'est pas exigé.
La fonction de chaque champ d'un formulaire doit être directement et clairement identifiable.Tous les formulaires doivent donc remplir les conditions suivantes:
Lors de l'envoi d'un formulaire, celui-ci est en général validé. S'il comporte des erreurs il faut que ce soit clairement expliqué: la nature et l'endroit de l'erreur doivent être indiquées, et pas uniquement de manière visuelle. Des messages du type 'Les erreurs sont indiquées en rouge' sont problématique s'ils ne s'accompagnent pas d'une information textuelle.
Pourcentages de sites où le critère est satisfait ou pas d'application:La couleur du texte doit contraster suffisemment avec la couleur de l'arrière-plan afin de garantir une bonne lisibilité pour tous, mais surtout pour les personnes malvoyantes..
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Pour rendre une page web accessible, il ne suffit pas de différencier les titres visuellement. Il faut utiliser les balises h1 à h6. Cela permet aux logiciels de lecture d'écran de constituer une table des matières automatique. Grâce aux éléments structurants, un lecteur d'écran peut générer automatiquement des tables de matière et faciliter la navigation dans les listes à plusieurs niveaux. Les pages structurées par la sémantique s'adaptent également mieux aux feuilles de style personnelles. Grâce à celles-ci les personnes malvoyantes peuvent définir avec plus de précision la couleur, la police de caractère, la taille et la position des parties de page et de texte.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Ce critère est identique au précédent mais souligne d'avantage l'importance de l'utilisation des balises et élément HTML adéquats lors de la publication d'une liste d'élément.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
Adobe Flash pose malheureusement de sérieux problèmes d'accessibilité.
D'une part, les objets de type Flash sont difficilement accessibles aux utilisateurs de navigateur textuel ainsi qu'aux utilisateurs de barrette Braille. D'autre part, les animations que ces objets peuvent poser de graves problèmes aux personnes malvoyantes, aux personnes épileptiques et dyslexiques.
Bien qu'il soit théoriquement possible de rendre les objets Flash compatibles avec les standards internationaux d'accessibilité, une alternative est actuellement toujours nécessaire. Les aides techniques sont malheureusement encore loin d'être aussi perfectionnées qu'on le voudrait pour interpréter tout à fait correctement le contenu des objets flash "accessibles".
Le World Wide Web Consortium, abrégé par le sigle W3C, est un organisme de standardisation à but non-lucratif, fondé en octobre 1994 comme un consortium chargé de promouvoir la compatibilité des technologies du World Wide Web telles que HTML. Un site web qui respecte les standards HTML a déjà une bonne base pour devenir accessible.
Un contrôle rapide peut être fait en utilisant l'outil de validation du W3C en ligne.
Ce critère est d'application sur tous les sites examinés.
La grande majorité des sites web évalués dans l'échantillon général (87,4%) sont inaccessibles, selon les critères de cette étude. En d'autres mots, seuls 12,6% des sites web belges sont facilement utilisables par la majorité de la population.
Prenons, à titre d'exemple, certains des critères qui ont obtenu les plus mauvais résulats.
Les résultats pour les sites du gouvernement flamand sont bien meilleurs, avec 63,7% de sites accessibles. Comment expliquer cette différence? L'échantillon n'était pas aléatoire puisqu'il contenait surtout les sites sur lesquels les efforts d'accessibilité s'étaient concentrés les dernières années. De nombreux efforts ont été fournis depuis 2007 pour améliorer l'accessibilité de ces sites et former le personnel. Le résultat obtenu montre que l'investissement n'a pas été vain et qu'il est possible d'améliorer significativement l'accessibilité d'un parc de sites lorsqu'il y a une réelle volonté d'y arriver et que l'on met en place des actions concrêtes. La relative simplicité de ces sites, qui ne contiennent par exemple pas beaucoup d'animations, contribue également à ce meilleur résulat.
Les sites web belges restent donc très majoritairement inacessibles, refusant l'accès à l'information à de nombreuses personnes en raison de leur handicap, de leur âge ou des technologies utilisées. Ce n'est pas une fatalité. Mais pour que cela change il faut que chacun s'investisse.
AnySurfer remercie les organisations suivantes qui ont apporté leur précieuse collaboration à ce projet:
Sans l'aide de ces personnes, ce projet n'aurait pu aboutir.
L'équipe AnySurfer (Jeroen, Gijs, Bart S, Bart DC, Sophie et Pierre)
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